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5 mars 2009 4 05 /03 /mars /2009 17:40

Sans doute que tout a été dit sur ce chef d’œuvre absolu, universel et au charme indémodable. Mais il faut le redire… car peut-être que tout le monde n’a pas bien écouté ! Tout ayant été dit, vous ne trouverez donc rien de nouveau dans les lignes qui suivent. Mais comme disait Prévert : « La nouveauté, c'est vieux comme le monde… »

Naissance d’un chef d’œuvre
Nice, janvier 1943. Jean-Louis Barrault, qui rêve d’interpréter le personnage  du célèbre mime Debureau, rencontre Marcel Carné et Jacques Prévert. Baptiste Debureau, français d’origine tchèque, créateur de la pantomime avec son personnage de Pierrot, était la vedette du Théâtre des Funambules. Il passa à la postérité en tuant un ivrogne qui l'importunait. Le tout Paris se précipita à son procès pour entendre enfin le son de sa voix !

Mais Marcel Carné juge impossible de ne traiter que cet épisode. Il suggère de conserver Debureau tout en l’entourant de personnages imaginaires et de personnages historiques, comme le célèbre comédien Frédérick Lemaître (artiste qu’à l'époque, Victor Hugo appréciait). Le film opposerait donc le théâtre parlé et le mime. Problème : Prévert est réticent car il n’aime pas la pantomime. Par contre, il est fasciné, par un autre personnage, bien moins poétique : Lacenaire, dit "le dandy du crime", « voleur par nécessité, assassin par vocation ». Sachant qu’on ne lui permettrait jamais de faire un film sur un meurtrier, si célèbre soit-il, il se rend compte qu’il pourrait mettre Lacenaire dans un film sur Debureau… et il adhère au projet. La trame du film, à la fois imaginaire et historique, était posée. Prévert invente alors le personnage de Garance pour Arletty lui offrant ainsi « le plus beau rôle de sa carrière » comme elle le confiera plus tard. 


Trauner (à gauche) et Prévert 
                                                         A droite : Marcel Carné








 

 

 

 

 

L’histoire

Paris, 1830. La vie bat son plein sur le boulevard du Temple, surnommé boulevard du Crime parce qu'il comptait un grand nombre de théâtres où l'on jouait un aussi grand nombre de drames qui comptaient à chaque fois un plus grand nombre encore de cadavres…

Depuis le poulailler de ces salles, que l’on nomme aussi le « paradis », les gens du peuple  - le vrai public - fait le succès ou parfois l'échec des tragédies, des mélodrames et des pantomimes.

Actrice sous-employée, la belle Garance (Arletty) enflamme les cœurs : toujours souriante, elle se laisse séduire tout en gardant toujours la tête froide. Un jour, se promenant avec son ami, le bientôt célèbre voleur Lacenaire, elle fait la connaissance de Baptiste (Jean-Louis Barrault), un jeune mime au talent prometteur. Pour elle c’est le coup de foudre, mais lui n’ose pas faire le premier pas.

Plus tard c’est un jeune acteur plein de fougue, Frédérick Lemaitre (Pierre Brasseur), qui lui fait une cour assidue. Tout ça sous les yeux de Nathalie, l’amoureuse transie de Baptiste, qui n’attend qu’une chose : se faire aimer de lui.


Le boulevard du Crime par Trauner et par Carné : 
















Voici trois scènes d’anthologie qui donnent toute la dimension du talent de Prévert :

 

  1. Frédérick Lemaitre (Pierre Brasseur), acteur débutant et coureur de jupons invétéré, croise pour la première fois Garance (Arletty) dans la foule :

 

Frédéric Lemaître

Vous avez souri !

Ne dites pas non, vous avez souri.

Ah, c’est merveilleux, la vie est belle et vous êtes si belle, vous aussi. 

Où allons-nous?

  Garance

C’est tout simple, vous allez de votre côté, moi du mien

  Frédérick Lemaître

Mais c’est peut-être le même ?

  Garance

Non.

  Frédérick Lemaître

Pourquoi ?

Garance

Parce que j’ai rendez-vous.

  Frédérick Lemaître

Oh, Rendez-vous ! 

Voila seulement deux minutes que nous vivons ensemble et vous voulez déjà me quitter.

Vous me quittez pour quoi, pour qui ?

Pour un autre, naturellement.

Et vous l’aimez, hein… cet autre ?

 Garance

Oh, moi, j’aime tout le monde.

  Frédérick Lemaître

C’est bien ce qui est merveilleux : je ne suis pas jaloux.

Mais lui, l’autre, il est un jaloux.

 Garance

Qu’est-ce que vous en savez?

  Frédérick Lemaître

Ils le sont tous sauf moi. (…)

D’abord, je vous dirai mon nom.

Je m’appelle Frederick. Me direz-vous le vôtre ?

  Garance

On m’appelle Garance.

 Frédérick Lemaître

Garance… oh, c’est joli !

  Garance

C’est le nom d’une fleur

Frédérick Lemaître

D’une fleur rouge comme vos lèvres…(…)

Dites-moi au moins quand je vous reverrai ?

Garance

Bientôt peut-être. Sait-on jamais avec le hasard.

Frédérick Lemaître

Oh ! Paris est grand, vous savez.

Garance

Paris est tout petit pour ceux qui s’aiment comme nous d’un aussi grand amour !

2. Baptiste (Jean-Louis Barrault) et Garance :

 

Baptiste

Mais je vous aime, Garance !  

Garance

Je vous en prie, Baptiste. Ne soyez pas si grave.

Vous me glacez. Je ne suis pas comme vous rêvez.

Il faut me comprendre. Je suis simple, tellement simple.

Je suis comme je suis.

J’aime plaire à qui me plaît, c’est tout.

Et quand j’ai envie de dire oui, je ne sais pas dire non.

 

 

3. Garance et le comte Édouard de Montray (Louis Salou)

 

Édouard

Je voudrais que vous m’aimiez.  

Garance

Mais je vous aime, mon ami.

Vous êtes séduisant, vous êtes riche, vous avez beaucoup d’esprits.

Vos amis vous admirent, les autres vous craignent.

Enfin, tout le monde vous aime, Edouard...  

Édouard

Tu sais bien ce que je désire, ce que je veux.  

Garance

C’est contradictoire, Edouard.

Non seulement vous êtes riche,

mais encore vous voulez que je vous aime comme si vous étiez pauvre.

Et les pauvres, alors?

On ne peut quand même pas tout leur prendre aux pauvres !

Soyez plus raisonnable, mon ami.

 

Les plus grands acteurs (Dustin Hoffman), les réalisateurs les plus fameux, comme Terry Gilliam, (Brazil) ont une véritable passion pour le film de Carné. « Un rêve projeté sur grand écran, dit Gilliam, dont la lumière et son aspect argenté, lunaire, donne au film cette dimension onirique. »

François Truffaut pour sa part disait : "J'ai fait vingt-trois films, des bons et des moins bons. Je les donnerais tous sans exceptions pour avoir signé Les Enfants du Paradis."

En 1995, Les Enfants du paradis a été élu meilleur film de tous les temps par les critiques à l'occasion du centenaire du cinéma.

 

Pour en savoir plus : http://www.dvdclassik.com/Critiques/enfants-du-paradis-dvd.htm
http://www.marcel-carne.com/filmographie/lesenfantsduparadis.html

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